Les comptes de RFF pour 2013 . Endettement et interrogations sur le modèle économique



Les comptes de RFF pour 2013 ont été publiés[1] (25/3/2014).
Un document qui permet de s’interroger sur  l’avenir du système ferroviaire.

Légere croissance en valeur. Recul des circulations


L’entreprise a connu en 2013 une faible croissance de son chiffre d’affaires (2 % à 5690 millions€), et  termine l’année avec un résultat opérationnel en repli, et un résultat net négatif en dégradation.

Cette évolution peut être reliée à un recul général de l’activité en trains-km (-2% pour les voyageurs et – 3% pour le fret).









Le fret ne paie pas

En 2013, le fret a repésenté environ 15 % des circulations (trains.km). Un niveau à comparer avec les 48 % des trains régionaux. De toute évidence, l’activité de transport de marchandises – aujourd’hui ouverte pour environ 1/3 aux « nouveaux entrants » - contribue peu au chiffre d’affaires, puisque les redevances tournent autour de 3% des redevances de prestations minimales de l’entreprise.  Au surplus,  cette activitié bénéficie-t-elle de subventions publiques, à hauteur de 110,6 millions €. (Pour les TER, le système est un peu différent, puisque RFF facture l’Etat au titre des redevances d’accès relatives aux trains régionaux de voyageurs TER et aux trains d’équilibre de territoire (TET).

Un ensemble d’ordres de grandeur qui permettent de comprendre l’extrême prudence des compagnies ferroviaires, et singulièrement de RFF par rapport aux projets concernant le fret.  
En effet, le "rendement tarifaire" du train.km, est  par exemple près de 9 fois plus important pour les trains grandes ligne. Du coup  la valorisation d’un réseau largement dédié aux marchandises serait très faible,  même en considérant les subventions, et ce, d’autant plus que les circulations sont peu denses.  Peu incitatif donc pour un investisseur.
Même une croissance brutale de l’activité fret ne produirait qu’une hausse marginale du chiffre d’affaires du gestionnaire d’infrastructures.  Une situation radicalement différente de celle des gestionnaires d’autoroutes. En effet, sur les autoroutes à péages, les poids lourds représentent également 15 % des circulations, et autour de 31 % des recettes. Une autre motivation !






Haut niveau d’investissement, endettement croissant.

Tournons nous maintenant sur la dynamique de l’entreprise.  
2013 coincide avec un très haut niveau d’investissement sur le  réseau (7,8 milliards d’€ pour l’exercice 2013, contre 5,4 milliards d’€ pour 2012 soit une croissance de 45%), dont une partie importante vise à renouveler le réseau existant, dont on sait qu’il a été largement négligé pendant de trop longues années.
Un tel effort, même soutenu par des subventions, se traduit mécaniquement par une augmentation très sensible de l’endettement de RFF. Ainsi, pour se contenter d’une analyse des grandes masses du bilan, entre 2012 et 2013, le total du bilan a augmenté de 7,4 milliards €. Les capitaux propres demeurant négatifs (-1,34 milliards €), c’est pour l’essentiel le volume d’enprunts financiers et les subventions qui assurent le financement de l’investissement (en gros moitié moitié). Et de fait, la dette financière totale atteint désormais 39,5 milliards €….  Ce qui, même avec des taux d’intérêt bas, coûte cher : en 2013 le coût de l’endettement financier net de RFF a été de 1195 millions €.
Ces chiffres peuvent être mis en regard de  la valeur nette comptable des immobilisations corporelles de 56 milliards €. Dans cet ensemble, la valeur nette du réseau serait de  31,9 milliards €.  Un montant à comparer à ce que les comptables appellent la « valeur d’utilité » du réseau qui est désormais évaluée à 38,8 milliards €, en raison d’un allongement de la période sur laquelle les «cash flows» projetés sont étudiés. (2030, date à laquelle le réseau est considéré comme stabilisé en raison du rattrapage du retard de renouvellement, au lieu de 2025).
On ne reviendra pas ici sur la valorisation du réseau (comptable et « d’utilité »), sur laquelle nous avions attiré l’attention[2], et qui nous semble aboutir à une sous-estimation de sa valeur et donc du niveau économique des péages.  C’est, selon nous, un problème fondamental, et qui, en l’absence d’harmonisation des pratiques en Europe, rend illusoire la comparabilité des coûts. Mais le modèle actuel de développement du système ferroviaire semble aboutir inexorablement à un alourdissement régulier de la dette et a rendu difficile, on l’a vu, le renouvellement normal du réseau.
Difficile donc de plonger dans l’optimisme, pour le rail en général et le fret ferroviaire en particulier. La combinaison d’une sous-évaluation du réseau, d’un financement peu satisfaisant, et d’un système tarifaire finalement peu propice à des prises de risque dans le domaine du fret pour l’investisseur, ne peuvent constituer une politique à long terme compatible avec les grands discours sur le rail.


P.S.


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