2016 au réveil : le rêve #corse.
Tiens allez, 2016 arrivant, rêvons un instant. Vous vous
éveillez, et soudainement l’incompréhension disparaît. La magie joue tout de
suite. Soudain les Corses, vous savez, un peu plus de 320 000 personnes vivant
sur une île qu’on appelle de beauté, se mettent à vous être compréhensibles.
Vous n’avez plus cette moue curieuse dès que le mot
« corse » est prononcé, vous perdez les réflexes « Barbieriens »
d’évocation de chèvres et de châtaignes, vous ne prononcez plus par pur
exorcisme les mots de République, de fil rouge, ou d’éternité.
Celui qui nomma, jadis, un pompier pyromane, ne
cherchera à plus prendre la posture de
ceux qui savent ce que d’autres ignorent concernant «les corses».
Curieux d’ailleurs, leur souci permanent de parler des corses et de prononcer
leur nom tout en leur disant qu’ils n’existent pas.
Désormais vous ne trouverez plus normal qu’un peuple soit
condamné à subir le clientélisme et le clanisme, celui-là même que vous aimiez
à combattre quand il ne concernait pas la Corse.
Vous commencez à comprendre qu’il est légitime que des
élections portent au premier rang des gens qui finalement voulaient qu’on leur
parle comme à des adultes en respectant leur besoin d’autonomie fondé sur
l’insularité et l’histoire. Vous acceptez un particularisme qui ne vous choque
guère quand l’Alsace – Lorraine demeure sous le régime concordataire, ou quand
Bayrou fait un discours en Béarnais.
Vous acceptez soudain l’inacceptable : qu’un peuple
revendique son existence, ce que vous aviez, d’ailleurs, déjà affirmé, au sein
de l’Assemblée Nationale en 1988. Vous trouvez « normal » que
certains rêvent de plus d’autonomie, et même qu’une petite minorité ose parler
d’indépendance.
Nation corse, peuple corse, gouvernement de la Corse, sont
devenus des mots intelligibles, ne provoquant ni indignation, ni révolte, ni
surtout l’outrance de propos mi-injurieux mi-condescendants. Mais le plus
important, c’est que, d’un seul coup, vous comprenez que la vision des choses
que l’on peut avoir là-bas n’est pas forcément la même que dans votre rue. Vous
comprenez l’attachement au drapeau corse ou à son hymne comme d’ailleurs à
celui des basques et des catalans ou des occitans que vous applaudissiez au
cours des matches de Rugby, mais siffliez lors de certains matches de foot.
Vous avez soudain découvert l’histoire des peuples et des
nations, celle des territoires, et de la République. Votre discernement vous
enseigne l’esprit critique, non seulement à l’égard des corses mais de tous,
comme la tolérance et l’apaisement. Soudain, vous pensez qu’un dialogue
ouvert, qu’une négociation équilibrée, vaut sans doute mieux que des postures raides,
et des rapports de force bruts. Vous redécrouvrez les vertus civilisatrices de
la démocratie. Dès 2016, peut-être !