Taxis, VTC, LOTI, etc... De l'imprévision à la résolution, toujours partielle, des conflits



Taxis, VTC, LOTI, etc... De l'imprévision à la résolution, toujours partielle, des conflits

Il y a 20 ans une de mes étudiantes créait un service de "shuttle" aéroports. Elle répondait à un besoin identifié de mise à disposition de et vers les aéroports de véhicules sur rendez-vous. Avec à la clé une adaptation précise à la demande (nombre de places, volume de bagages etc..).
Le marché était difficile, les marges étroites, et les rapports déjà compliqués avec les Taxis.
Le support technique de la prestation était à l'époque une combinaison de téléphonie portable, d'internet (pour les clients lointains), et de dispatching au siège de l'entreprise.
Ce que révélait cette expérience c'est à la fois l'existence d'un marché (une demande différenciée), une absence d'offre de la part des taxis traditionnels et le dépoussiérage nécessaire des activités dites alors de la grande et de la petite remise.
Il était en effet évident que le téléphone portable et internet - pas encore fusionnés dans un Smartphone - allaient non seulement concurrencer à la marge les taxis (seuls autorisés à stationner et à marauder) - mais modifier l'économie du transport à la demande en permettant une gestion optimisée en temps réel de véhicules connectés.
Il y avait donc un conflit latent, parfois réel, et un développement croissant d'activités d'autant plus utiles qu'elles bénéficiaient de la faible capacité des taxis.
D'ailleurs c'est à un doublement de l'offre qu'on assista de fait en 10 ans en Ile de France semble-t-il.
Il eut été judicieux, à l'époque, de se dire que la réglementation contingentaire et tarifaire des taxis, devait sans doute être révisée dans le cadre d'une réflexion générale sur le transport individuel ou de petits groupes à la demande.
La réflexion sur le marché et son évolution - ne serait-ce que sous le coup de l'innovation technologique - aurait pu et dû être menée comme nous l'avions fait au début des années 1980 pour le transport routier (lui aussi alors contingenté, tarifé etc...). Je me souviens encore de ces licences qui prenaient l'avion entre Marseille et Paris pendant que les camions attendaient leur tour au bureau régional de fret...
Rien ne se passa de tel dans le domaine du transport (individuel) de voyageurs à la demande.

L'arrivée du Smartphone, combinant téléphonie, géolocalisation et prolifération d'application spécifiques, a ouvert un champ nouveau, et permis l'irruption de services de plate-forme, c'est à dire la globalisation des marchés et l'optimisation des déplacements et du remplissage des véhicules. L'importance du choc - il a en gros 10 ans avec le premier IPhone - qu'on pouvait anticiper dès l'apparition du premier Smartphone (effective au milieu des années 1990), est considérable, mais une fois encore pris pour un risque, un danger pour les activités existantes (y compris les VTC d'alors), et non un facteur de changement pour l'ensemble du marché.
C'est alors que commence une longue période de tensions et de tentatives de réglementer, non globalement, mais à la marge pour limiter la concurrence entre métiers.
Le résultat n'a pas été de produire un système global et cohérent, et une régulation efficace du marché, mais de juxtaposer des règles partiellement incohérentes visant à protéger et parfois à freiner l'impact des technologies. Du coup les conflits perdurent ou se déplacent sans donner de visibilité à chacun. Le conflit opposant les "Uber" à la plate-forme internationale symbolise l'émergence d'une nouvelle problématique elle aussi prévisible : celle du pouvoir gigantesque des grandes plate-forme numériques monopolistes et de ses conséquences économiques et sociales.
Je me souviens de l'époque de la préhistoire télématique où je n'arrivais pas à convaincre les transporteurs de ce que leurs Bureaux régionaux de fret (BRF) allaient disparaître au profit d'un monopole privé (ce sera pour un temps Télé route) agissant sur Minitel, s'ils ne prenaient pas les devants. Plutôt que d'anticiper on a voulu se protéger -démarche illusoire - contre la technologie, certains professionnels suivis par certains fonctionnaires rêvant d'imposer un statut de bureau de ville aux bourses de fret télématiques. On ne fit donc rien.

De nouveaux bouleversements, tant pour les voyageurs que pour le fret sont en devenir. Ils continueront à modifier les potentialités et les rapports de force. Il serait temps d'accepter une approche prospective fondée sur de grands principes de régulation, plutôt que de produire sans cesse des couches de règles inadaptées. 

Le chemin de fer, des années 1930 jusqu'au début des années 1980 a vécu dans un contexte où réglementation, tarification, contingentement, et fiscalité de la concurrence (routière et fluviale) étaient censés le protéger. Pour quel résultat ? Une question qu'il faudrait toujours se remémorer. Tant il est vrai que la résolution partielle des conflits ne peut jamais constituer une politique efficace à moyen terme.

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