#Catalans : L’avenir noir des commentateurs est-il crédible ?
#Catalans :
L’avenir noir des commentateurs est-il crédible ?
Qu’on soit pour, contre, ou indifférent au projet des
nationalistes catalans, il me semble que cela ne dispense nullement de
réfléchir.
Bon. Il y a la réalité institutionnelle de l’Espagne. On
connaît l’origine de la constitution de ce pays qui sortait des années noires
du franquisme. L’équilibre trouvé alors a évolué, et connu des hauts et des bas
tournant d’ailleurs autour de l’interprétation de la constitution, plus que de
la constitution elle-même. Or c’est de ce conflit d’interprétation que découle
l’actuel référendum catalan.
Il y a aussi les traités européens. Ils ne prévoient la
sortie de l’Union d’un pays qu’en cas de décision formelle de celui-ci, et
négociation de sortie. Le cas de la
sécession unilatérale d’une région ou d’un Etat membre d’un Etat fédéral n’est
nulle part évoqué. Il faudrait donc, en cas de déclaration unilatérale
d’indépendance, non seulement de trouver une réponse, mais au surplus le faire
vite ne serait-ce que pour éviter un ensemble de dommages économiques, sociaux
et politiques à la fois prévisibles et incertains. Or on fait comme si il allait de soit que l’Espagne continuerait à demeurer
membre de l’UE et que la Catalogne en serait de facto exclue du jour au
lendemain, ce qui n’est pas plus facile ceci dit pour la Catalogne que pour le
Royaume Uni. Il faudra bien entendu réviser les traités ne serait-ce que pour
acter la perte de substance de l’Espagne et imaginer une solution pour la
Catalogne. Or celle-ci est très « européiste », souhaite demeurer
dans l’Union, et tout le monde à intérêt économiquement et socialement à ce qu’elle
y reste. Bien entendu certains seront tentés de lui offrir un statut Suisse ou
Norvégien, à la fois punitif et gratifiant, mais qui fondamentalement pourrait
être dénoncé s’il n’était pas consenti. Car il existe le précédent Algérien.
L’Algérie en se séparant de la France, a décidé explicitement de ne pas faire
partie de la Communauté Européenne. Le Groenland de son côté a explicitement
voté par un référendum consultatif en février 1982 en faveur de
son retrait de la Communauté économique
européenne, puis négocié un traité avec cette dernière. Or la Catalogne n’a
jamais, bien au contraire, envisagé celà.
Est-il vraiment raisonnable d’obliger – et selon quel
fondement juridique – une partie de ce qui est aujourd’hui l’Espagne à quitter
l’UE ? Bien entendu non. On ne voit aucune bonne raison pour l’UE de se
séparer d’un PIB de plus de 220 milliards €, et a fortiori de se compliquer la
vie pour 90 milliards € d’échanges avec la Catalogne. Pas plus d’ailleurs que
l’Espagne n’a intérêt à compliquer ses échanges avec la Catalogne. Socialement,
économiquement et humainement, l’évidence d’une sortie de l’UE s’avère une stupidité
qu’on ne voit guère l’Union Européenne encourager. Alors pourquoi donc en
parle-t-on ? Probablement pour dessiner un avenir noir aux catalans s’ils
persistaient à défier Madrid ?
What else ?
Une bonne discussion, pragmatique, éviterait cette inutile
dramatisation et cet affrontement des orgueils, mais encore faudrait-il que nos
élus et nos gouvernants ne fassent pas comme si le problème ne les regardait pas, et
que nos voisins prennent le temps d’une vraie discussion. Il est temps !