L'étonnant feuilleton de la réforme de la #SNCF
Oh! on pourrait remonter loin.
Mise en scène
Aux interrogations formulées dès le début des années 1980 sur l'équilibre à long terme de la SNCF. Billevesées !
Au rapport de feu le Conseil National des Transports sur le financement des infrastructures en 2000, dubitatif sur la soutenabilité financière du système ferroviaire. Sornettes !
Aux mises en garde de la Cour des Comptes (qui parle de "modèle insoutenable"), et des travaux sur le bilan ex-post des investissements ferroviaires. Fariboles...
Il faut être naïf pour croire à une suite sans fin d'erreurs.
Ce mépris pour les évidences financières consistait bien à préférer une dette ferroviaire à une dette publique.
En 2016 d'ailleurs, le gouvernement rappelait en août 2016 au Parlement sa position (1) : "il n’est pas opportun d’envisager à ce stade un dispositif de reprise de la charge de la dette historique du gestionnaire d’infrastructure".
On ne peut mieux dire. "Pas opportun"
Ce qui n'avait d'ailleurs pas empêché la SNCF de dévaloriser ses actifs comptable ment de 12 milliards € (exercice 2015), dont 9,6 pour la seule SNCF-Réseau. Une somme astronomique reflétant non la baisse de valeur réelle des actifs, mais celle des recettes nettes attendues de l'activité du gestionnaire du réseau ferré. Contrairement au réseau routier - estimé au coût de remplacement - on estime donc les rails à une valeur découlant directement du sur-endettement et de la faiblesse des péages. Curieusement, ce résultat est alors considéré comme "de pures écritures comptables", n'ayant "aucun impact concret." Très curieux. Car en creux c'est bien directement la durabilité du modèle ferroviaire qui est en cause, et non la valeur réelle de ses actifs qui s'évapore. Et le changement de statut de Sncf-Réseau implique mécaniquement de faire face à la fois désormais à des capitaux propres négatifs et à un sur-endettement manifeste. Ce qui était non opportun devient nécessaire...
Mais le feuilleton continue, les réformes se poursuivant, embrassant les questions organisationnelles et sociales.
Et on lance une mission dont sort un rapport, le rapport Spinetta (février 2018).
Qu'on se souvienne on nous expliquait qu'il fallait réformer la gouvernance (à bas les Epic !), ne plus appliquer le "statut" aux nouveaux embauchés, recentrer le rail sur son "domaine de pertinence" (autrement dit vendre les bijoux de famille, et tant pis pour la politique de groupe), etc..
Et j'avoue m'être étonné du caractère très "technocratique" d'un rapport ne présentant pas l'ébauche d'une feuille de route décrivant l'avenir du transport ferroviaire. Quant à l'imagination... on la laissait à d'autres.
Seconde saison
Commence alors une seconde saison du feuilleton. Le Gouvernement prend le dossier à son compte, abandonne la fixette de Spinetta sur les petites lignes, et reprend en gros les recommandations du rapport. Bien entendu on imagine alors parfaitement l'état d'esprit des cheminots et les crispations.
J'écrivais début mars : "La "ronde" de concertation engagée avec les syndicats sur la Sncf a un objet limité. Organisation, statut des cheminots, ouverture à la concurrence sont les trois sujets posés sur la table.
(1)Rapport remis aux commissions permanentes du Parlement compétentes en matière ferroviaire et financière, en application
Mise en scène
Aux interrogations formulées dès le début des années 1980 sur l'équilibre à long terme de la SNCF. Billevesées !
Au rapport de feu le Conseil National des Transports sur le financement des infrastructures en 2000, dubitatif sur la soutenabilité financière du système ferroviaire. Sornettes !
Aux mises en garde de la Cour des Comptes (qui parle de "modèle insoutenable"), et des travaux sur le bilan ex-post des investissements ferroviaires. Fariboles...
Il faut être naïf pour croire à une suite sans fin d'erreurs.
Ce mépris pour les évidences financières consistait bien à préférer une dette ferroviaire à une dette publique.
En 2016 d'ailleurs, le gouvernement rappelait en août 2016 au Parlement sa position (1) : "il n’est pas opportun d’envisager à ce stade un dispositif de reprise de la charge de la dette historique du gestionnaire d’infrastructure".
On ne peut mieux dire. "Pas opportun"
Ce qui n'avait d'ailleurs pas empêché la SNCF de dévaloriser ses actifs comptable ment de 12 milliards € (exercice 2015), dont 9,6 pour la seule SNCF-Réseau. Une somme astronomique reflétant non la baisse de valeur réelle des actifs, mais celle des recettes nettes attendues de l'activité du gestionnaire du réseau ferré. Contrairement au réseau routier - estimé au coût de remplacement - on estime donc les rails à une valeur découlant directement du sur-endettement et de la faiblesse des péages. Curieusement, ce résultat est alors considéré comme "de pures écritures comptables", n'ayant "aucun impact concret." Très curieux. Car en creux c'est bien directement la durabilité du modèle ferroviaire qui est en cause, et non la valeur réelle de ses actifs qui s'évapore. Et le changement de statut de Sncf-Réseau implique mécaniquement de faire face à la fois désormais à des capitaux propres négatifs et à un sur-endettement manifeste. Ce qui était non opportun devient nécessaire...
Mais le feuilleton continue, les réformes se poursuivant, embrassant les questions organisationnelles et sociales.
Et on lance une mission dont sort un rapport, le rapport Spinetta (février 2018).
Qu'on se souvienne on nous expliquait qu'il fallait réformer la gouvernance (à bas les Epic !), ne plus appliquer le "statut" aux nouveaux embauchés, recentrer le rail sur son "domaine de pertinence" (autrement dit vendre les bijoux de famille, et tant pis pour la politique de groupe), etc..
Et j'avoue m'être étonné du caractère très "technocratique" d'un rapport ne présentant pas l'ébauche d'une feuille de route décrivant l'avenir du transport ferroviaire. Quant à l'imagination... on la laissait à d'autres.
Seconde saison
Commence alors une seconde saison du feuilleton. Le Gouvernement prend le dossier à son compte, abandonne la fixette de Spinetta sur les petites lignes, et reprend en gros les recommandations du rapport. Bien entendu on imagine alors parfaitement l'état d'esprit des cheminots et les crispations.
J'écrivais début mars : "La "ronde" de concertation engagée avec les syndicats sur la Sncf a un objet limité. Organisation, statut des cheminots, ouverture à la concurrence sont les trois sujets posés sur la table.
Sur ces trois sujets les choses sont pratiquement dites. L'ouverture à la concurrence est une application du droit qu'il convient simplement de décliner, en particulier pour ce qui relève des TER ; le statut des cheminots est annoncé comme condamné ; et l'organisation promise au retour en arrière (SA) et au découpage. Le "coup" du gouvernement aura été finalement d'enfermer la réforme dans ces seules questions qui ne règlent rien, et qui, en polarisant tout sur le statut, permettent dans un premier temps un soutien populaire au nom de la lutte contre les "privilèges". Un gag, à vrai dire quand on connait l'origine et l'ampleur des vraies inégalités de revenu et de patrimoine en France."
Et je m'interrogeais sur l'intérêt qu'il y avait à agiter le chiffon rouge du statut en l'absence de toute feuille de route crédible.
J'écrivais un mois plus tard "J’ai comme une impression de voir un film déjà vu. Celui où l’on hystérise les débats, oppose les acteurs avant même de discuter. Ainsi en est-il dit-on du « dialogue social » en France."
En fait, on comprenait assez vite que le conflit - et les grèves - tenaient sans doute largement à la méthode. Fin avril, on pouvait s'inquiéter de ce "qu'une partie de la réforme (ait) déjà été adoptée par l’Assemblée Nationale, avant même la fin des discussions entre l’État et les syndicats. Comble d’ironie le projet s’est trouvé baptisé de « pacte », alors que rien ni de près ni de loin ne peut y ressembler."
A ce jour, les principaux éléments déterminants de l'avenir du groupe ferroviaire SNCF sont toujours inconnus, non débattus. Curieux feuilleton. On attend la saison 3.
(1)Rapport remis aux commissions permanentes du Parlement compétentes en matière ferroviaire et financière, en application
de l’article 11 de la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire