Le chaînon manquant de la politique des transports
Le chaînon manquant de la politique des transports
Traditionnellement, les politiques de transport s’articulaient autour de deux grands objectifs (ensemble ou non). Le premier était concentré précisément sur la capacité de transport et sa qualité, en se référant – au prix de calculs explicites – aux gains économiques attendus par exemple de l’innovation ou de la création de nouvelles infrastructures. Cette logique est présente et majeure depuis que la puissance publique développe des infrastructures.
Le second était tourné vers des objectifs de régulation. Il s’agit alors de faire en sorte que les métiers du transport et les modes ne subissent pas de concurrence déloyale des « autres ».
Ces deux questions n’ont pas disparu du débat public et font l’objet, régulièrement de polémiques. Passons.
La nouveauté c’est que depuis une bonne vingtaine d’années, et de manière épisodique dès le premier choc pétrolier, on se veut traiter d’objectifs d’environnement et de développement durable (climat...), ce qui peut se traduire aussi – de manière parfois rapide et inexacte – en termes de parts de marché des différents modes.
Naturellement, ces orientations ou motivations ont donné lieu à des politiques allant de l’efficace à l’inefficace, du vertueux au désastreux. L’histoire des politiques des transports en témoigne[1]. Mais la situation actuelle est plus complexe. On souhaite en effet poursuive dans le même temps trois objectifs qui peuvent être difficiles à articuler. Pour autant, la difficulté majeure tient au fait que le lien concret entre les objectifs du troisième type (développement durable, parts de marché etc..) et les moyens à mettre en œuvre est compliqué à expliciter et surtout à évaluer. Mais surtout, pour un ensemble de raisons, les politiques s’arrêtent souvent en chemin, en déclinant des objectifs tout en mettant en regard des mesures ou des décisions n’ayant qu’un impact mineur, voire incertain, sur le résultat escompté. C’est en ce sens que je parle d’inefficacité totale et avérée des politiques publiques en ce qui concerne le fret en France, au sens où les objectifs poursuivis ne sont jamais atteints.
Or la responsabilité des politiques - à commencer par ceux chargés du développement durable – c’est bien de réclamer à leurs services la définition et l’évaluation de stratégies viables parmi lesquelles le choix public peut s’opérer. Le fait-on ? Certainement non. Du moins les textes qui ont été rendus publics ne peuvent en aucun cas faire office de propositions stratégiques, et les orientations arrêtées n’y font jamais référence. Or chaque projet, chaque investissement majeur, devrait être évalué en fonction de la stratégie adoptée, ce que nous ne faisons pas.
Les débats incessants sur les grands projets contestés reflètent parfaitement le grand flou stratégique. L’efficacité des choix opérés ne peut se juger de manière abstraite, ni au nom des principes, mais bien en regard de cette stratégie, qui, bien entendu, doit se décliner localement en fonction des réalités économiques, sociales et écologiques.
On attend toujours cette stratégie, et le débat permettant à la représentation Nationale de l’adopter.