OuiBus & Blablacar : quelle vision du cœur de métier ?

OuiBus & Blablacar : quelle vision du cœur de métier ? 

Au moment où j’écris ces lignes on ne sait pas grand-chose sur la vente de OUIBUS  à Blablacar. Les éléments chiffrés n’ayant pas été dévoilés.
Mais cette imprécision permet au moins de poser des questions, en espérant recueillir des réponses. En effet, cette information est triplement intéressante : 

·     L’annonce fait suite au rapprochement opéré pendant la grève SNCF permettant à BlaBlaCar de capter un trafic de report du rail significatif. D’où la poursuite de l’offre globale (covoiturage, train, autocar) de la SNCF (Oui). 

·     La cession marque aussi le retrait de la SNCF comme opérateur des cars dits Macron, après l’accumulation de 165 millions de pertes à fin 2017 dont 36 millions en 2017 (et sans doute encore importantes en 2018) pour 55 millions € de chiffre d’affaires. Un ordre de grandeur à la fois inquiétant pour la SNCF et le marché. En effet, selon l’ARAFER, OuiBus était passé de 15 lignes au second trimestre 2015 à 156 au même trimestre de 2018, ce qui représente 1/3 du total des liaisons (parfois concurrentes) offertes par les opérateurs. BlaBlaCar apparaît en ce milieu de 2018 avec 8 liaisons.  Sans doute aidé par la grève SNCF et les prix des carburants, le taux de remplissage global de l’ensemble des lignes « libres » d’autocar augmente en 2018  (61 % au 2T 2018), améliorant sans doute les résultats des opérateurs.  Mais la situation de 2017 faisait apparaître une recette kilométrique moyenne très insuffisante pour couvrir les coûts, et les données publiées par l’Arafer en septembre 2018, en progrès, font apparaître un taux moyen de couverture à peine supérieur à 50 % . La décision de la SNCF sanctionne ainsi une stratégie, qui après la recapitalisation de 2015, nécessitait une nouvelle décision, mais aussi une situation de marché. Ce sera donc la cession et un plan social touchant 102 personnes sur 230 (on rappelle ici que l’entreprise dispose actuellement de 160 licences communautaires). Un échec donc, bien qu’il soit présenté sous un jour plus positif eu égard à la croissance des trafics. Mais une situation problématique d’ensemble du marché dont on peut penser qu’il est loin d’être viable en l’état. Erreur de prévision et/ou erreur de stratégie ? Le débat est ouvert. 

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·     Le choix fait par la SNCF d’entrer – avec d’autres semble-t-il – au capital de BlaBlaCar peut être vu à la fois comme la marque d’une stratégie visant à soutenir l’un des éléments de l’offre globale de l’entreprise (qui du coup ne conserve en propre que le train, BlaBlaCar détenant alors les cars et le covoiturage), et la contribution financière indirecte à la restructuration de Ouibus. Ce lien financier annonce-t-il quelque chose d’autre, ou vient-il uniquement conclure une expérience coûteuse, et un enthousiasme excessif, on peut en discuter. D’autant que BlaBla serait en 2018 pour la première fois profitable (grâce ou pas à la SNCF ?). On aimerait que le groupe ferroviaire clarifie donc sa propre vision du marché, au-delà de l’effet « plate-forme » de la mobilité. Si on comprend bien comment l’attrait de marges sur le marché global de la mobilité peut intéresser une entreprise, et donc justifier cette stratégie de plate-forme on débouche à nouveau sur une question fréquente relative à la vision du groupe ferroviaire : Commissionnaire ou place de marché pour quoi faire de son cœur de métier ferroviaire ? 

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