#ADLC Avis de l’Autorité de la Concurrence sur la #Corse (#maritime, #carburants, #déchets, #distribution)

 L’autorité de la concurrence vient de rendre son rapport 10A11 « relatif au niveau de concentration des marchés en Corse et son impact sur la concurrence locale », un rapport fortement attendu dans l’île. 

Ayant eu à travailler sur 3  (Maritime, Carburants, Distribution) des 4 sujets traités, il ne semble utile de livrer mon analyse de cet avis. 


La perception globale 

1. En premier lieu, cet avis - même s’il ne révolutionne pas la connaissance de la « concurrence locale » - a le mérite d’exister, et d’émaner d’une autorité indépendante de marché.

Pourquoi ?  Essentiellement parce qu’il acte trois éléments majeurs à la compréhension de l’économie insulaire 

        - il compile de manière assez large les faits et chiffres ; 

        - il livre une analyse juridique et concurrentielle des réalités de marché, et reprend l’essentiel des données socio-économiques disponibles ; 

        - enfin il acte les positions et analyses des principaux acteurs du marché.

Tout ceci n’est pas exempt de discussions possibles ni même de critiques, mais essentiellement dans la mesure où l’évaluation des distorsions évoquées, et présentées comme des risques n’est pas faite. De même, des arguments qualitatifs - à charge ou à décharge - ne sont pas formellement quantifiés. 

2. En second lieu, il préconise quelques recommandations qui pour l’essentiel visent à sécuriser les futures DSP maritimes (avec l’intervention de l’Autorité de Régulation des Transports) et la lutte contre les effets éventuels de la concentration (évolution du régime et réglementation ou législation des prix).

3. En revanche le rapport a pu décevoir dans la mesure où, pour aucun des dossiers il n’évalue l’effet économique des distorsions, ni ne désigne formellement autre chose que des risques.  


Les carburants

Le focus sur la carburants vient confirmer largement les analyses que nous avions pu faire, tout comme celles du collectif « agissons contre la cherté des carburants en Corse », à la fois sur le constat de l’évolution des écarts continent-Corse, que sur les facteurs non géographiques de cet écart. En revanche, en dehors de certaines précisions, rien ne vient apporter de la transparence quant aux coûts de la chaîne d’approvisionnement, ni même confirmer ou infirmer l’origine des évolutions. De ce point de vue, le rapport est décevant. 


Le maritime

Le caractère tumultueux des DSP maritimes et la multiplicité de décisions de justice et la jurisprudence européenne, permettent de mieux caractériser la problématique maritime. Singulièrement, celle-ci n’est jamais reliée à celle plus globale de la gestion des continuités territoriales en Europe, et particulièrement en Méditerranée, pas plus qu’elle n’est insérée dans une analyse des marchés du transport maritime insulaire. Mais si ceci est logique (en raison de l’importance des contentieux «français ») peut-être aurait-il fallu ne pas se contenter de l’analyse juridique effectuée et se risquer à une analyse socio-économique des transports insulaires par voie maritime. Peut-être aussi, après la critique  (juridique) des pratiques aurait-on pu approfondir la question du « besoin de service public », et celle de son « coût » éventuel, puisque c’est la question centrale. Enfin, aurait-on pu aller plus loin en s’interrogeant sur la façon dont - en pratique - pourrait s’effectuer une évolution  du service public compte tenu des barrières à l’entrée et des risques (réels ou prétendus) d’une transition. 


Que faire de l’avis ? 

Nombre de rapports apportent certes des éléments de connaissance, mais peu sont à l’origine de décisions à la mesure de ce qu’ils révèlent ou préconisent. 

Ainsi, cet avis, destiné au gouvernement, et indirectement à la Collectivité de Corse et son exécutif, pourrait être suivis de décisions... ou pas. 

Dans le meilleur des cas on assisterait à une traduction législative, qui, pour être utile, devrait intervenir dans les mois qui viennent au moins pour le transport maritime. 

Or précisément, puisque l’Autorité de la Concurrence souhaite explicitement reporter la charge de donner un avis que les prochaines projets de DSP insulaires sur l’Autorité de régulation des transports, il faudra aller très vite, et cette dernière devra - a minima - s’y préparer. En retarder la mise en oeuvre en ruinerait l’intérêt perceptible. Et on imagine qu’une telle modification du droit, même si l’avis ne devait pas être « conforme » posera à la CTC un problème de principe (pourquoi, pourquoi nous ?), et de droit (pourquoi ces seules DSP.. et sinon il faudra en définir le champ). Une façon aussi de sortir partiellement du jeu le gouvernement, qui, jusqu’à présent a presque toujours soutenu les actes contestés devant les tribunaux nationaux ou européens. Petite révolution ? 

L’Etat de son côté prendra sans doute aussi le temps pour savoir si son intérêt politique est ou non d’étendre finalement les dispositifs de contrôle et réglementation des prix  et des concentrations à l’ensemble des territoires insulaires de la République. Une logique qui peut séduire plus aisément les élus insulaires que la technocratie parisienne...encore que.


P.S. 18.11.2020

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