Continuité territoriale maritime Subir ou maitriser ?
Continuité territoriale maritime
Subir ou maitriser ?
La question maritime, ou plus exactement celle de la Continuité territoriale, empoisonne depuis maintenant de longues années les rapports entre l’Etat, puis la Corse et la justice, européenne et administrative, en charge de faire respecter le droit de la concurrence et des aides d’Etat.
- On n’a pas encore eu un vrai débat sur la continuité territoriale
Quand j’ai écrit en 2017 mon livre sur « La tumultueuse histoire de la desserte maritime de service public de la Corse » (L’Harmattan, 2017), je concluais : « En effet, d’ici 2019, si d’autres évènements ne viennent pas modifier à nouveau le cours du feuilleton maritime de la desserte de la Corse, il faudra bien trouver le moyen de laisser les opérateurs candidats faire la preuve de leurs capacités à répondre aux besoins énoncés, et à la collectivité d’ouvrir véritablement le débat sur les conditions de desserte. Or c’est ce débat technico-économique autant que politique qui importe, comme il a importé dans l’histoire. »
« Il faudra bien », disais-je, faisant, à quatre années de distance, preuve sinon d’optimisme, mais de trop de logique rationnelle, tant il me semblait essentiel de régler ce problème central de l’adéquation entre les objectifs assignés et les moyens de les satisfaire. J’espérais en fait qu’on parvienne, enfin, à échapper aux mirages et au tumulte d’une histoire fantastiquement pesante, symbolique et coûteuse pour la collectivité.
La vraie question aujourd’hui est de savoir pourquoi cet espoir est déçu, pourquoi il n’est pas possible de mener un débat contradicoire, non sur un rapport de l’exécutif, mais sur les solutions possibles, et les objectifs poursuivis. Parce qu’enfin, si ce débat n’a pas eu lieu, a fortiori sur la base d’analyses pluralistes, force est de constater que « le besoin de service public » revendiqué, et le cahier des charges associé a bien varié depuis le début des concessions décidées par la collectivité de Corse. Avec cette interrogation obsédante : que paie-t-on en définitive ?
Des prérogatives corses depuis plus de 20 ans.
Parce qu’il faut bien désormais considérer, non le poids essentiel de ce qui était la SNCM et sa gestion, mais l’exercice, depuis la fin 1999, des prérogatives corses dans les choix relatifs au maritime.
C’est alors qu’on grave quasiment dans le marbre les horaires - et donc les contraintes de rotation des navires - et qu’on inaugure cette notion, désormais considérée comme illégale, de « service complémentaire ». Arrêté en 2001 ce premier cahier des charges de DSP décentralisée a été, faut-il le rappeler, adopté par la droite, contre les nationalistes et la gauche, non compris les radicaux. Et ce fût la première décision de justice à l’encontre du service complémentaire en juillet 2001. Rappelons aussi ici que c’est dès 2006 qu’est clairement évoquée (Conseil de la Concurrence) le principe d’une DSP ligne à ligne. On pouvait donc, parfaitement comprendre, avant même les décisions de la justice européenne et la disparition de la SNCM, que la continuité territoriale devait être redéfinie dans le respect du droit. Comme il était clair depuis le début des années 1990 (Rapport Pagès) que le régime ancien de la continuité territoriale devait changer. Or depuis, ce fût la stratégie de l’édredon avec le concours (plus ou moins avisé) de l’Etat. L’issue faisant légitimement peur, dans ses implications économiques et sociales, au lieu d’en étudier les meilleurs conditions possibles pour la Corse, et d’en préparer et en aménager l’avènement, on évacua le débat de fond, et à force de votes et de contestations des recours multiples devant la justice (européenne et nationale), on repoussa sans cesse les échéances. Ce qui eut pour effet de provoquer la disparition de la SNCM, et une cascade de procédures et d’annulations…
Cette stratégie a un coût.. qui ne peut qu’être cumulatif et croissant, puisqu’il faut in fine, en sus du surcoût de la DSP, indemniser et payer les intérêts
Là où une analyse rationnelle conduit à anticiper voilà donc une fois encore la Corse en situation de subir.
P.S.